Le Harcèlement Psychologique

Saviez-vous que…

Saviez-vous que…

Lorsqu’une personne apprend qu’elle est visée par une plainte, il n’est pas rare qu’elle s’exclame :

😲 « Moi ? Harceler ? Jamais de la vie ? Je n’ai jamais voulu harceler qui ce que soit ! »

Contrairement à certaines idées reçues, sachez que l’intention de harceler est sans aucune importance pour déterminer si la situation constitue ou non du harcèlement.

Ce qui compte, c’est plutôt la perception de la victime et l’effet des actes commis envers elle qui sont les éléments déterminants, comme vous le verrez dans cet article.

Pour qu’une situation soit qualifiée de harcèlement psychologique, cinq conditions essentielles doivent être réunies. Nous allons décortiquer ces conditions pour vous.

Décryptage des cinq conditions essentielles

Plongeons dans le détail des cinq conditions, en nous basant sur leur interprétation jurisprudentielle.

Une conduite est vexatoire dans la mesure où elle cause une blessure à l’amour-propre, parce qu’elle est humiliante ou abusive, par exemple. Elle contrarie. Elle cause un tourment.

Une conduite vexatoire se manifeste de manière répétée à travers des comportements, paroles, actes ou gestes. Plus les gestes sont graves, moins il en faudra pour caractériser la situation.

La conduite vexatoire doit s’inscrire dans un continuum, marqué par des actes répétés sur une certaine période.

  📌 Le test de la victime raisonnable pour apprécier le caractère vexatoire de la conduite

Il existe un test jurisprudentiel appelé la « victime raisonnable ». Lorsque les tribunaux apprécient le caractère vexatoire d’une conduite à partir de la preuve, ils appliquent ce test en suivant un modèle « subjectif-objectif » :

• Subjectif : La perception de la victime est prise en compte, mais ne suffit pas à établir le caractère vexatoire de la conduite. 

• Objectif : L’analyse objective vérifie si une personne raisonnable, prudente et diligente, placée dans les mêmes circonstances percevrait la conduite comme vexatoire.

👉Saviez-vous qu’une seule conduite, si elle est suffisamment grave, peut constituer du harcèlement psychologique, même sans répétition ?

C’est le cas notamment des actes de violence physique grave (voies de fait, menace de mort, etc.).

📌 Que signifie « hostiles » ?

Le terme « hostile » renvoie à une attitude d’opposition, d’animosité ou de menace. Il peut s’agir d’un comportement belliqueux, antagoniste ou défavorable.

Son appréciation est objective : on se demande si une personne raisonnable percevrait ces actes comme hostiles.

📌 Que signifie « non désirés » ?

Cette condition vise à vérifier l’absence de consentement ou d’acceptation de la part de la présumée victime. Elle est particulièrement importante en matière de harcèlement sexuel.

👉Saviez-vous qu’il n’est pas nécessaire de prouver un refus explicite pour établir qu’un comportement est non désiré ?

L’appréciation du caractère « non désiré » est subjective, mais pas uniquement. Elle peut être confirmée par des éléments objectifs, comme la relation de subordination qui peut limiter la personne victime dans sa capacité à s’affirmer en posant ses limites face à son patron.

Cette condition n’est analysée qu’après avoir établi l’existence d’une conduite vexatoire. De plus, il doit exister un lien de causalité entre la conduite et l’atteinte.

📌 Que signifie « atteinte à la dignité » ?

La dignité renvoie au respect, à l’estime de soi et à l’amour-propre d’une personne. Elle réfère aussi aux dimensions fondamentales et intrinsèques de l’être humain. Une atteinte peut résulter notamment de traitements injustes ou inéquitables, d’humiliations, de marginalisation ou de dévalorisation. Il n’est pas nécessaire que cette atteinte laisse des séquelles permanentes. 

📌 Que signifie « atteinte à l’intégrité psychologique ou physique » ? 

Une telle atteinte doit laisser des marques ou des séquelles qui dépassent un certain seuil et provoquer un déséquilibre physique, psychologique ou émotif plus que temporaire, sans qu’il soit pour autant permanent.

📌 Que signifie « un milieu de travail néfaste » ?

Un milieu de travail néfaste se caractérise par un climat nuisible, malsain et dommageable pour la personne victime. Tout comme pour l’atteinte à la dignité ou à l’intégrité, il doit y avoir un lien de causalité direct entre la conduite vexatoire et la dégradation des conditions de travail. 

👉Saviez-vous qu’un environnement devient objectivement toxique lorsqu’il empêche une personne d’exercer normalement son emploi?

L’analyse globale de la preuve à l’égard des 5 conditions

Une analyse globale doit être faite à partir de l’ensemble de la preuve. Les comportements, paroles, actes ou gestes peuvent sembler anodins lorsqu’ils sont pris isolément. Toutefois, c’est leur analyse globale, permettant d’apprécier notamment leur effet cumulatif, qui conduit à établir l’existence de harcèlement.

Exemples de manifestations pouvant constituer une conduite vexatoire

• Violence, intimidation et menaces

• Moqueries, insultes, dénigrement

• Surveillance excessive

• Humiliations publiques ou privées

• Isolement, mise à l’écart ou retrait de tâches injustifié

• Abus de pouvoir ou autres comportements abusifs 

  
  

En conclusion, nous avons passé en revue les cinq conditions essentielles qui permettent d’établir qu’une personne est victime de harcèlement psychologique au travail.

J’espère que cet aperçu vous a apporté un éclairage utile et qu’il vous aidera à repérer plus efficacement les situations à risque afin de mieux les prévenir dans vos milieux de travail. 

Pour approfondir votre compréhension, je vous invite à consulter les décisions clés sur lesquelles cet article s’appuie. Elles vous sont offertes dans leur version intégrale et accessibles en un seul clic dans la section qui leur est réservée à la fin.

Pour aller plus loin et explorer plus en détail la portée et les limites des cinq conditions essentielles au harcèlement psychologique, je privilégie une approche pratique à travers des cas réels qui seront analysés ponctuellement dans ce blogue.

Restez à l’affût! Ne manquez pas la sortie du prochain article.

Merci de votre attention et à bientôt!

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Décisions clés

1. Bangia c. Nadler Danino S.E.N.C., 2006 QCCRT 419.

2. Breton c. Compagnie d’échantillons « National » ltée, 2006 QCCRT 601 (CanLII).

3. Centre hospitalier régional de Trois-Rivières (Pavillon St-Joseph) et Syndicat professionnel des infirmières et infirmiers de Trois-Rivières (Syndicat des infirmières et infirmiers Mauricie—Coeur-du-Québec), (Lisette Gauthier), 2006 CanLII 91865 (QC SAT).

4. Law c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), 1999 CanLII 675 (CSC), [1999] 1 RCS 497.

5. Azarpoor c. 9340-6288 Québec inc. 2024 QCTAT 2906 (CanLII).